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Démembrement de propriété : De quoi s'agit-il ? Comment le mettre en place ?

Démembrement de propriété : De quoi s'agit-il ? Comment le mettre en place ?

Acquérir un bien immobilier par un achat, un héritage, une donation ou un investissement est un procédé idéal pour se constituer un patrimoine. Toutefois, la pleine propriété n’apporte pas que des avantages. Entre fiscalité, droits de succession, entretien et gestion du logement, cela a de quoi rendre sceptique. Pour y remédier, le démembrement de propriété peut être la solution. De quoi s’agit-il et dans quel cas peut-il être pratiqué ? Explications.

Qu’est-ce que le démembrement de propriété ?

Le démembrement de propriété consiste en une division de la pleine propriété d’un bien par un acte juridique. Avant d’entrer dans une définition plus détaillée, comprenons mieux ce qui constitue la pleine propriété. Elle se compose de trois éléments distincts qui méritent explication pour ceux qui n’ont pas choisi latin en option 3ème langue :

  • L’usus qui est le droit d’user du bien, autrement dit d’y habiter ;
  • Le fructus qui est le droit de percevoir les fruits du bien, autrement dit de le louer ;
  • L’abusus qui est le droit de disposer du bien à terme, autrement dit de le vendre, de le donner ou de le léguer par un acte testamentaire.

L’usus et le fructus forment à eux deux l’usufruit, que l’on peut définir comme le droit de jouissance du bien, c’est-à-dire de l’habiter ou de le louer, ce qui engrangera des revenus locatifs (les loyers), mais aussi des frais d’entretien.

L’abusus, plus couramment appelé la nue-propriété, est donc par déduction le droit de disposer du bien sur le long terme, après l’avoir acquis à moindre coût.

Lorsqu’un ou plusieurs usufruitiers se partagent le droit de jouissance du bien, et qu’un ou plusieurs nus-propriétaires se partagent le droit de disposer du bien à terme, on parle alors de démembrement de propriété, soit dit encore, de façon moins barbare, de séparation ou de décomposition du droit de propriété. Les droits dits démembrés sont indépendants l’un de l’autre, ce qui signifie que ni l’usufruitier ni le nu-propriétaire ne peuvent procéder à la vente du bien sans l’accord préalable de l’autre.

Durant combien de temps la propriété peut-elle être démembrée ?

Le démembrement est obligatoirement temporaire, soit à terme fixe généralement de 3 à 20 ans, soit en viager, donc jusqu’au décès de l’usufruitier. Dans les deux situations, les conditions sont impérativement fixées et connues dès la mise en place du démembrement par l’acte juridique établi. A la fin de la période de démembrement intervient le remembrement. Vous l’aurez compris, le nu-propriétaire récupère alors la pleine propriété du bien et peut décider librement de son devenir : le vendre, l’habiter, le remettre en location et en percevoir les revenus locatifs, voire même le démolir. S’il existe plusieurs nus-propriétaires, ils deviennent donc tous co-propriétaires, et devront s’accorder à l’unanimité sur le devenir du bien.

Dans quels cas mettre en place le démembrement de propriété ?

Deux raisons peuvent entraîner un démembrement de propriété, qui peuvent être une situation de fait, imposée juridiquement, ou par voie contractuelle, sur la volonté de démembrer. Ces deux raisons donnent lieu à plusieurs situations dans lesquelles le démembrement est pratiqué.

  • La vente d’un appartement en viager : Le viager consiste à vendre la nue-propriété de sa résidence principale et d’en conserver l’usufruit. Au décès de l’habitant, le nu-propriétaire devient propriétaire de plein droit. C’est une pratique courante d’ascendant à descendant direct ;
  • Les parts de SCPI de rendement (Société Civile de Placement Immobilier) : Investir dans une SCPI consiste en l’achat de parts d’une société qui investit dans un ensemble immobilier, pour un taux de rendement élevé. Les SCPI en nue-propriété permettent aux investisseurs de devenir nu-propriétaires et la société de gestion, souvent un bailleur social, de devenir usufruitière. Ainsi, à la fin du démembrement, chaque nu-propriétaire devient copropriétaire à hauteur de son investissement ;
  • L’anticipation de la succession : Pour diminuer un patrimoine soumis aux droits de succession, les ascendants peuvent procéder de leur vivant à la donation démembrée qui consiste à transmettre à leurs héritiers la nue-propriété d’un ou plusieurs biens tout en en conservant l’usufruit. Ainsi, les héritiers sont déjà en partie propriétaires, sans que la fiscalité associée au bien ne leur incombe. Ce procédé est un démembrement simple ;
  • La protection du conjoint survivant : Un couple peut décider d’opter pour le démembrement croisé, qui consiste en l’acquisition par chaque membre du couple d’une partie de l’usufruit et d’une partie de la nue-propriété. Ce procédé sera souvent retenu par les couples pacsés non-mariés qui souhaitent mettre à l’abri le conjoint survivant. En cas de décès, le membre restant conserve ses parts notamment d’usufruit, donc le droit d’habiter le bien ;
  • La gestion d’un bien familial : Dans le cas d’un héritage ou d’un achat immobilier commun au sein d’une famille, autrement dit d’une maison de famille, il est possible de faire le choix du démembrement croisé en SCI (Société Civile Immobilière). Dans ce cas, chacun des membres investisseurs, appelés alors associés, sont à la fois usufruitiers et nus-propriétaires du bien. En cas de décès de l’un des associés, cela les protège par la conservation de leur usufruit ;
  • Les contrats d’assurance-vie : Grâce au démembrement de la clause bénéficiaire, le souscripteur d’une assurance-vie peut désigner séparément l’usufruitier et le nu-propriétaire à son décès. Ainsi, le souscripteur peut par exemple désigner son conjoint survivant comme usufruitier, et ses enfants comme nus-propriétaires. Le ou la veuve pourra utiliser les fonds à sa convenance, et les enfants récupèreront la pleine propriété au décès du second parent, sans subir les droits de succession.

Qu’en est-il de la fiscalité ?

L’avantage fiscal apporté par le démembrement est généralement l’objectif premier de cette pratique. C’est un vrai procédé d’optimisation fiscale. Pour vous en dire davantage, il conviendra d’abord de distinguer le démembrement en viager du démembrement à terme fixe dont dépend le pourcentage de la part de pleine propriété.

La fiscalité du démembrement en viager

Elle est établie selon un barème déterminé par l’âge de l’usufruitier. Plus il est jeune, plus l’usufruit représentera une part importante de la pleine propriété, et inversement. L’application d’un barème semble plutôt logique. Le démembrement est généralement mis en place lorsque le propriétaire, qui devient alors usufruitier, décide de mettre son bien en viager. Par exemple, l’usufruitier de plus de 91 ans donnera une valeur de nue-propriété à hauteur de 90 % de la pleine propriété, contre 10 % d’usufruit.

La fiscalité du démembrement à terme fixe

Dans ce cas, en revanche, la valeur fiscale de l’usufruit ne dépend plus de l’âge de l’usufruitier, mais plutôt de la durée établie du démembrement. Elle correspond automatiquement à 23 % de la valeur de pleine propriété pour chaque tranche contractuelle de 10 années.

Démembrement : le rapport gagnant - gagnant

S’il se pratique autant, c’est bien parce qu’il apporte des avantages, tant à l’usufruitier qu’au nu-propriétaire.

L’usufruitier dispose de l’usage du bien, à sa convenance. Aussi, il peut décider de le louer et d’en tirer les fruits. Si l’usufruitier reste assujetti à l’impôt sur la fortune, mais aussi à l’impôt sur le revenu par les recettes foncières perçues, il pourra toutefois déduire la nue-propriété de sa part de pleine propriété, pour n’être imposé qu’en fonction. C’est donc un avantage fiscal fort intéressant, notamment pour les propriétaires habitants, souhaitant diminuer leur impôt en diminuant la valeur fiscale du bien leur revenant.

Le nu-propriétaire est le plus avantagé fiscalement par le démembrement. En effet, la nue-propriété n’est pas soumise à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). De plus, puisqu’elle ne permet pas de générer des revenus fonciers, il est impossible de déclarer du bénéfice. En revanche, il est possible de déclarer du déficit par l’éventuel emprunt réalisé pour l’investissement ou pour les gros travaux qui reviennent à la charge du nu-propriétaire (ceux engageant la structure du bien). Ainsi, elle propose a minima l’optimisation fiscale, voire la défiscalisation.

De parent à enfant, un abattement fiscal permettant de s’acquitter des droits de donation est appliqué tous les 15 ans en cas de donation d’une somme pouvant aller jusqu’à 100 000 €. Un couple propriétaire peut ainsi céder 200 000 € par enfant en nue-propriété sans subir la fiscalité liée à la donation.

Sachez enfin qu’au décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devient propriétaire (ou copropriétaire) du bien sans que des droits de succession ne lui soient demandés. En revanche, en cas de décès du nu-propriétaire, les héritiers se voient transmettre la nue-propriété qui entre alors dans la succession, avec les frais qui s’appliquent à hauteur de la valeur fiscale de la nue-propriété.

Les avantages du démembrement

Pourquoi le démembrement est-il si pratiqué par les Français ? Pour les avantages qu’il leur procure.

  • Un outil d’optimisation fiscale : Un barème fiscal partagé pour réduire sa fiscalité, une nue-propriété non-soumise à l’impôt sur la fortune, une transmission de patrimoine bénéficiant d’un abattement fiscal. Les propriétaires d’un patrimoine immobilier important, devant déclarer des revenus fonciers, parfois soumis à l’IFI et s’inquiétant des droits de succession dont devront s’acquitter leurs héritiers ont tout intérêt à opter pour le démembrement ;
  • Un outil de succession patrimoniale : Le démembrement est souvent pratiqué en famille, notamment à l’âge avancé de la première génération, pour organiser la succession. Les propriétaires peuvent alors décider de démembrer la propriété de leur bien en donnant la nue-propriété aux enfants futurs héritiers, tout en en conservant l’usufruit. Il s’agit d’un démembrement en viager. De son vivant, l’usufruitier peut disposer du bien sans risque de revente de la part des nus-propriétaires ;
  • Un outil de protection du conjoint survivant : Rappelez-vous que la vente d’un bien ne peut être décidée que sur accord conjoint de l’usufruitier et du nu-propriétaire. Conserver l’usufruit de son bien immobilier, ou déclarer bénéficiaire usufruitier de son contrat d’assurance-vie son conjoint survivant, sont des procédés de mise à l’abri du couple.
  • Un outil de constitution de patrimoine : Investir dans un bien immobilier démembré devient accessible aux investisseurs qui disposent d’un trop faible capital pour acquérir un bien en pleine propriété. La nue-propriété permet d’être fin propriétaire du bien pour un coût d’acquisition moindre, du fait du partage de la pleine propriété par le barème fiscal appliquant une décote sur la valeur d’achat, et une décote sur la fiscalité.

Le bémol : l’engagement à long terme

Ces avantages sont contrebalancés par un inconvénient de taille : la durée du démembrement. Puisqu’elle est fixée dès sa mise en place, les termes doivent en être respectés, or la situation du nu-propriétaire peut changer. Pour un démembrement à terme fixe, le nu-propriétaire engagé sur 20 ans qui viendrait à vouloir récupérer son capital investi pour X bonnes raisons n’aura d’autre choix que de donner ou céder sa part, sans ne plus pouvoir prétendre à la pleine propriété au moment du remembrement. Pour un démembrement en viager, seul le décès de l’usufruitier marquera le remembrement, et cela peut durer de nombreuses années (et c’est bien tant mieux), mais en cas de difficultés financières, le nu-propriétaire peut se trouver contraint ici aussi de donner ou céder sa part.

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